freudienne

DE L'ART D'EXISTER

Le 18/12/2025

DE L'ART D'EXISTER

181225

Chaque être naît avec un patrimoine, conservé dans les cellules de son corps, qui donne à celui-ci plus ou moins de force, plus ou moins de résistance, plus ou moins de durabilité. Le destin de l'individu est lié à ce legs primitif. La réparation du corps, c'est l'affaire de la médecine. La santé mentale, c'est l'affaire de la médecine. Or je ne suis pas médecin. 

En conséquence, la responsabilité et le sérieux qu'implique l'accompagnement d'un travail sur soi impose la vigilance quant à la santé de mes interlocuteurs (puisque nous échangeons par la parole). 

Comme je n'ai aucune compétence à poser un diagnostic médical, conseiller à un patient d'aller consulter un médecin pour vérifier si son problème ne relève pas de la médecine est un acte responsable et fondamental. Il est nécessaire, au moindre doute, d'écarter l'éventualité d'une maladie. En retour, le soin médical trouve souvent un complément dans l'accompagnement analytique. Je pense à la dépression nerveuse, la récupération après un accident, la convalescence après une maladie... l'oeuvre du médecin est soutenue par celle de l'analyste.

Comme Freud l'explique dans son texte sur l'analyse profane, le médecin n'est pas davantage compétent dans le travail analytique, que l'analyste ne l'est pour soigner un problème médical. L'analyse requiert une formation spécifique, une sensibilité spécifique, une pensée spécifique, pratique spécifique basée sur une connaissance théorique qui ne repose pas sur la théorie médicale, les deux théories connaissant même des interférences. Le père de la psychanalyse lui-même fit le constat tardif qu'il n'était pas et n'avait probablement jamais vraiment été un médecin, et ajoute même que le médecin, par l'angle selon lequel il aborde le soin, par le domaine qui est le sien, par la pensée qui est la sienne, ne se trouve pas dans les dispositions propices pour mener un travail d'analyse. La conscience d'avoir un corps ne suffit pas à faire un médecin. La conscience d'avoir un inconscient ne suffit pas à faire un analyste (sans oublier que de l'inconscient, nous ne savons que ce que la conscience nous révèle, ceci présentant toujours le risque de parler d'une langue dans une autre langue...)

Le constat du père de la psychanalyse est d'autant plus valable aujourd'hui, quand la pensée marchande a envahi les esprits soignants et les a soumis à la funeste loi de l'efficacité, considérée comme un principe, qui sous-tend la chaîne : "Je souffre - j'achète un soin -, je le consomme, je ne souffre plus". En d'autres termes : "J'ai mal à la tête-je prends un aspirine - je n'ai plus mal à la tête." 

L'analyse n'est absolument pas soumise à ce principe. Elle requiert du temps, de la patience, de la capacité à s'aventurer dans l'inconnu. On ne diagnostique pas l'inconnu, on s'y aventure. L'entreprise est une vraie exploration. L'explorateur ne connaît pas le domaine qu'il explore. Il doit prendre le risque du temps.

Imaginons un instant que la psychée est une jungle. On s'y perd, on y fait des rencontres plus ou moins heureuses ou inquiétantes, on revient en arrière, on tente par ici, par là. Peu à peu, on acquiert la connaissance de l'inconnu qui devient connu, plus compréhensible, plus abordable. La résolution d'une difficulté commence par la bonne connaissance de ses origines. 

L'âme est une jungle.

Mais, sempiternelle interrogation, qu'est-ce que l'âme? Une divagation poético-philosophico fumeuse? D'aucuns le prétendent, confiants inconditionnels en la raison, insensibles à l'énergie subtile, fondamentale, surprenante de la Vie. Cette énergie qui non seulement précède la raison, mais de surcroit l'engendre. Alors, l'âme? C'est quoi? C'est où? C'est quand? C'est comment? 

Qu'en sais-je? Pas grand-chose... Ni la réflexion ni la lecture ne sauraient apporter des certitudes sur un tel incertain. J'en découvre les territoires nouveaux, les mouvements nouveaux, les légendes inédites à chaque analyse, avec chaque patient, à chaque rêverie dans l'éveil, et à chaque rêve dans le sommeil. 

L'âme est une métaphore. 

Un lieu de l'être (et non un lieu du corps) où se concentrent toutes les forces qui "animent" l'être. Elle est l'antre des émotions, des sentiments, des courants subtils, du souffle de la vie. François Cheng nous apprend qu'en Chine, elle est ce quelque part en l'être traversé par la force primordiale, où se rencontrent les énergies célestes et telluriques, pour donner la force de vie à l'être lui-même. 

Voici de quoi nous nous occupons, lors de nos séances de "conversation". Voici à quoi nous nous occupons. Sentir, comprendre dans ses forces et ses faiblesses l'énergie profonde et subtile de la vie de l'âme. Celle qui porte le bonheur et qui, entravée par les conflits occultes, l'empêche de s'installer. 

Alors, l'analyse est-elle un soin? Oui! Un soin non médical. Un soin de l'être. Un soin de l'âme. Un soin existentiel. Un accompagnement dans l'exploration, la compréhension et l'amélioration du vivre. Je me reprends aussitôt. Certes, l'analyse est un soin, mais l'analyste ne soigne pas. Il aide. Conduire une analyse, c'est dire au patient : "Soigne-toi toi-même. Je viens avec toi. Je t'aide." Cette aide s'appuie sur des moyens : la capacité d'écoute, la connaissance théorique, l'expérience pratique, l'intelligence de l'humain. Et le véritable analyste, lors d'une analyse, est le patient lui-même. En lui, en elle, analysant et analysé se confondent. Le dit analyste - je n'aime pas tellement ce mot, trop pompeux, j'en trouverai un autre - se consacre à assurer un accompagnement. Comme si, dans la nuit, dans l'inconnu, il tenait à bout de bras une lampe, pour éclairer le chemin que devine et choisit le patient. "Allons par ici, allons plutôt par là..."

Le but d'une I.T.A. n'est d'autre que le "savoir être". Améliorer du mieux possible les capacités à (re)trouver un équilibre dynamique qui porte en avant. À aider l'Autre à se perfectionner dans son "art d'exister". 

L'art de vivre concerne les actions, les choix, disons le style. L'art d'exister se joue à l'intérieur, dans cette obscurité de l'être où nous nous aventurons, une chandelle à la main, pour mieux se comprendre, mieux se connaître. Dans le but de vivre du mieux possible.

à suivre...

tous droits réservés © Olivier Deck

CONNAISSANCE, CO-NAISSANCE

Le 01/12/2025

"L'essentiel est que l'analyste, s'il doit être en position de supposé-savoir, doit assurément refuser le savoir mais aussi et surtout se le refuser à lui-même." 

(Jean Laplanche in Nouveaux fondements de la psychanalyse.)

Le travail de l'analyste, qui confie son esprit à l'attention flottante, c'est à dire l'esprit libre - le plus possible - de la raison-raisonnante, réclame une perception fine des mouvements profonds que suscitent en lui les dires du patient. Les ressentir, avant de les penser. L'énergie qui circule entre les deux êtres ( pour le néophyte : tout ce que la théorie met sous le vocable "transfert"), n'est pas à sens unique.

Le transfert est une puissante voie de communication, d'échange, de relation, qui connaît des heures de fluidité ou d'engorgement au cours de l'analyse. Freud en son temps l'avait précisé : l'analyse, c'est avant tout l'analyse du transfert. L'analyse de la situation présente, où viennent se concentrer toutes les forces agissant par ailleurs. 

L'I.T.A. se déroule en face à face, en cela elle est psychanalyse appliquée, et non psychanalyse pure. Le face à face renforce la difficulté citée plus haut. Il implique une relation interpersonnelle, inter-subjective, marquée par la personnalité de chaque partie, qui n'est pas sans effet sur la neutralité. La psychanalyse sur le divan, analyste hors du champ de vision, ne place pas les deux parties à la même distance, sur le même niveau, ni symbolique, ni physique.

En face à face, le regard, l'apparence, l'attitude, l'expression du visage et du corps sont des éléments qui comptent autant que les mots eux-mêmes, parce que, à l'écart du conscient, ils échappent plus facilement à la vigilance des défenses. Le "comportement" du patient ou de la patiente est une donnée importante de l'analyse inter-subjective. Le comportement a aussi son discours, sa langue, ses lapsus et ses actes manqués... 

Tout ceci constitue une différence de taille entre la pratique psychanalytique pure et celle de l'approche qui nous concerne ici. L'analyste a la difficile tâche de trouver la bonne distance, et de prémunir sa pensée de la connaissance théorique, qui peut être une puissante source de résistance. Là encore Freud a fait une mise en garde : la plus grande résistance à la psychanalyse, c'est la psychanalyse. Il en va de même de toutes les méthodes de soin par la parole.

Lorsqu'il aborde la séance, l'analyste doit donc retrouver un état d'ignorance, qui n'est ni l'ignorance du crétin ni celle du néophyte. C'est une ignorance adossée à un savoir, lequel savoir ne doit pas troubler l'ignorance en ce qu'elle comporte d'ouverture. Vous me suivez?

Quelle ignorance? Nous parlons ici de celle de l'élève, ouverte, disponible pour acquérir de la connaissance. Quelle connaissance? La connaissance puisée dans cet inconnu que le patient explore en lui-même. Elle viendra peu à peu combler (du mieux possible) l'ignorance de l'analyste quant à la vérité du patient. Et l'ignorance du patient face à lui-même. Tous deux se retrouvent devant une connaissance nouvelle. Quelque chose de neuf est advenu chez l'un comme chez l'autre : co-naissance.

À partir de ce moment, la connaissance de la métapsychologie, et l'expérience de l'analyste peuvent entrer en jeu. Jusque-là, le praticien s'est efforcé de laisser la théorie dans sa besace, dans laquelle il s'est retenu d'y plonger la main trop tôt, pour ne pas entraver la marche en avant. Car le but d'une analyse n'est pas de coller à une théorie qui la corrobore. Le but, c'est l'équilibre, le goût de vivre. 

Chaque analyse est surprenante, et aucune connaissance théorique ne vient pas à bout des mystères de l'être. Nous cheminons ensemble, sur le fil du sensible, vers une vérité qui ne nous livrera jamais tous ses secrets. Qu'il serait désespérant de tout savoir sur tout.

à suivre, si vous voulez bien me suivre...

 tous droits réservés © Olivier Deck

THÈSES, HYPOTHÈSES?

Le 21/11/2025

VOUS AVEZ DIT HYPOTHÈSE?

18.XI.25

Les conversations analytiques nous amènent souvent à nous aventurer dans le mystère des contrées hantées par la culpabilité. 

Elle est là, tapie dans l'ombre de l'âme, comme une bête toujours prête à sauter sur sa proie. La culpabilité, à l'instar de sa proche cousine l'angoisse, est un sentiment flottant, une force opportuniste qui rôde, toujours prête à investir les situations et les actes de la vie.

Les racines de la culpabilité plongent profondément dans l'histoire de l'être. Elle installe progressivement dans l'âme une tendance vouée à s'accentuer en chemin, au gré des situations propices. Et plus insidieusement encore, elle pousse l'être à agir de façon à créer lesdites situations, et entretenir un cycle d'engendrement négatif.

Lors d'un travail d'I.T.A., nous organisons la lutte contre la culpabilité en suivant une double stratégie : analyser ses manifestations dans la réalité (les situations, les actes, les conséquences des actes), et chercher ses origines par une patiente anamnèse, une récit minutieux de la genèse de la personne, afin d'amener à la conscience les éléments primitifs, démêler l'écheveau des multiples fils qui tissent la trame dans laquelle l'âme se trouve prisonnière. Une fois conscients, ces éléments conflictuels deviennent vulnérables, d'une part parce qu'ils sont accessibles, d'autre part parce qu'ils perdent de la force, car ils craignent la lumière.

Les conséquences de la culpabilité sont considérables. Confiance en soi ébranlée, entraînant une dévalorisation de l'estime de soi, mettant à mal l'équilibre du rapport à l'Autre et à l'existence elle-même : je n'assume pas mes actes, je doute, je reviens sur ma décision, je me donne tort, je déconsidère mon propos, mon idée, j'illégitime mes interventions si elles déclenchent un conflit, même si je suis dans mes droits, je regrette mes décisions même si elles sont justes... La culpabilité affaiblit l'ensemble de la dynamique de l'esprit et, par répercussion, fragilise la capacité à faire des choix, à s'assumer, à "être" en tant que soi-même.

À chaque décision, chaque épreuve relationnelle, un juge inconsciente se lève, regarde le "moi" de haut et s'exclame : "Accusé, levez-vous !" Et l'innocent plaide coupable, ébranlé par des forces qui agissent en lui, contre lui.

Restaurer la confiance en soi, renforcer l'estime de soi sont les deux piliers sur lesquels nous nous appuyons pour lutter contre la culpabilité et récupérer la force qu'elle mobilise, pour la mettre au service de l'énergie de vie.

à suivre... si vous voulez bien me suivre.

☆☆☆

L'I.T.A. est fondée sur la métapsychologie freudienne. Elle est une méthode de psychanalyse appliquée, pensée pour le monde et l'individu actuels.

INFOS, RDV : n'hésitez pas à prendre contact 

#psychanalyse #psy #thérapie #interthérapieanalytique #freud #freudienne #intersubjectivité #soinparlaparole #artthérapie #olivierdeck

COUPABLE? NON COUPABLE?

Le 18/11/2025

14.XI.25

Les conversations analytiques nous amènent souvent à nous aventurer dans le mystère des contrées hantées par la culpabilité. 

Elle est là, tapie dans l'ombre de l'âme, comme une bête toujours prête à sauter sur sa proie. La culpabilité, à l'instar de sa proche cousine l'angoisse, est un sentiment flottant, une force opportuniste qui rôde, toujours prête à investir les situations et les actes de la vie.

Les racines de la culpabilité plongent profondément dans l'histoire de l'être. Elle installe progressivement dans l'âme une tendance vouée à s'accentuer en chemin, au gré des situations propices. Et plus insidieusement encore, elle pousse l'être à agir de façon à créer lesdites situations, et entretenir un cycle d'engendrement négatif.

Lors d'un travail d'I.T.A., nous organisons la lutte contre la culpabilité en suivant une double stratégie : analyser ses manifestations dans la réalité (les situations, les actes, les conséquences des actes), et chercher ses origines par une patiente anamnèse, une récit minutieux de la genèse de la personne, afin d'amener à la conscience les éléments primitifs, démêler l'écheveau des multiples fils qui tissent la trame dans laquelle l'âme se trouve prisonnière. Une fois conscients, ces éléments conflictuels deviennent vulnérables, d'une part parce qu'ils sont accessibles, d'autre part parce qu'ils perdent de la force, car ils craignent la lumière.

Les conséquences de la culpabilité sont considérables. Confiance en soi ébranlée, entraînant une dévalorisation de l'estime de soi, mettant à mal l'équilibre du rapport à l'Autre et à l'existence elle-même : je n'assume pas mes actes, je doute, je reviens sur ma décision, je me donne tort, je déconsidère mon propos, mon idée, j'illégitime mes interventions si elles déclenchent un conflit, même si je suis dans mes droits, je regrette mes décisions même si elles sont justes... La culpabilité affaiblit l'ensemble de la dynamique de l'esprit et, par répercussion, fragilise la capacité à faire des choix, à s'assumer, à "être" en tant que soi-même.

À chaque décision, chaque épreuve relationnelle, un juge inconsciente se lève, regarde le "moi" de haut et s'exclame : "Accusé, levez-vous !" Et l'innocent plaide coupable, ébranlé par des forces qui agissent en lui, contre lui.

Restaurer la confiance en soi, renforcer l'estime de soi sont les deux piliers sur lesquels nous nous appuyons pour lutter contre la culpabilité et récupérer la force qu'elle mobilise, pour la mettre au service de l'énergie de vie.

à suivre... si vous voulez bien me suivre.

☆☆☆

L'I.T.A. est fondée sur la métapsychologie freudienne. Elle est une méthode de psychanalyse appliquée, pensée pour le monde et l'individu actuels.

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SITE : https://www.itanet.fr

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DES ILLUSIONS, DÉSILLUSION

Le 14/11/2025

12.XI.25

L'un des buts du travail analytique, dans l'échange de parole et la relation inter-personnelle (il faut être deux pour mener une conversation), consiste à découvrir ce qui, dans la perception de la réalité, relève des possibilités réelles, ou irréelles, réalisables ou non réalisables. 

Nous cherchons à débusquer les illusions, en apprenant à les distinguer des idéaux. Les illusions entretiennent une distance avec le réel et les possibilités qu'il offre. Elles sont source de tensions qui ne peuvent trouver leur destin, à savoir la détente. Nous ne confondons pas l'illusion, soit le mensonge fait à soi-même pour tenter d'éviter le désarroi, avec "les illusions" qui relèvent de l'optimisme et animent l'envie de vivre le plus sereinement possible en équilibre sur le fil de l'existence. 

Dès lors que les illusions flirtent avec l'impossible, elles engendrent le malheur, sous une forme plus ou moins évidente, plus ou moins destructrice, plus ou moins consciente. 

Ainsi, l'analyse de soi est un voyage vers un art de vivre sa vie dans le réel, tout en poursuivant des idéaux qui doivent se distinguer progressivement de l'illusoire.

Notre but n'est cependant pas d'aller vers un vécu froid, mécanique, voué à l'efficacité, inféodé aux contraintes de la vie moderne, dépourvu de rêve et de fantaisie. Les licornes, les elfes, les magiciens n'existent pas, mais ils peuvent être utiles au bonheur dans la seule mesure où ils égayent l'âme, sans la tromper. 

Le plaisir de vivre - que les conditions de la vie elle-même mettent toujours en péril - est un état de détente qui requiert la découvertes des origines des tensions, la distinction en elles des tendances de vie et des tendances délétères, pour atteindre un état d'équilibre dynamique, une circulation harmonieuse de l'énergie dans son cycle nécessaire et vital de tension et de détente.

à suivre... si vous voulez bien me suivre.